Viviane venait ici, au cours de ses errances dans la forêt. La déesse Diane l’avait condamnée à ne jamais quitter ces bois, sauf à trois reprises. Alors la fée arpentait son domaine et du haut de cette crête, elle pouvait embrasser la forêt et les landes d’un seul regard. Et y attendre l’amour et le rêve, le vent de la liberté. On raconte aussi que c’est là, sur la colline du Val sans Retour, au milieu des bois et des rochers, dans son château de pierre, que la fée Viviane retenait Merlin enchanté.
De là le nom de Maison de Viviane et peut-être aussi celui de Tombeau des Druides, Merlin étant réputé le chef des Druides.
Le tombeau des druides
En effet, des chercheurs et curieux se penchèrent au XIXe siècle sur Brocéliande et ses mystères. La mode était aux racines gauloises et celtiques de la France. Et cet attrait était plus grand encore en Bretagne où l'on voyait, des Celtes partout. Les techniques de datation étaient encore loin de voir le jour et toutes ces architectures frustes, indéniablement très antiques, furent donc attribuées aux Celtes, aux Gaulois, aux druides.
Mais aujourd’hui la science a parlé, les Druides, ceux de l’Antiquité, n’ont pas bâti ces monuments, érigés avant eux par les derniers hommes préhistoriques, mais les auraient utilisés, affirme t'on, pour leurs cérémonies !
Le dragon dort dans les environs..
Ceux qui arrivent par le chemin venant de la Touche Guérin doivent franchir une crête rocheuse avant de parvenir à l’Hôtié. S’ils savent voir la légende derrière la réalité, ils reconnaîtront sans peine dans la forme de ce relief… un dos de dragon ! Un dragon qui dort là depuis des éternités, et que le piétinement des marcheurs ne dérange même pas. Enfin… jusqu’à quand ? On dit aussi que si l’on pose le pied à un endroit précis de son échine, le monstre fabuleux s’éveillera et alors…
Si l’on s’éloigne de l’Hôtié vers la droite, en grimpant sur quelques centaines de mètres, les griffes d’un autre monstre enfoui s’élèvent vers le ciel. Il faut y grimper. La patte pétrifiée du saurien vous offre une des deux plus belles vues de la forêt…
Et le lutin n’est pas bien loin !
Les puristes prétendent qu’une variété spécifique de lutins bretons, les korandons, habitués des dolmens, ont élu domicile au Jardin des Moines et à l’Hôtié de Viviane.
Félix Bellamy, le plus grand connaisseur de Brocéliande de la fin du XIXe, était formel : « Là surtout demeurent les Korrigans qui dansent sur les tertres, la nuit, au clair de lune, autour des pierres levées ; ils chantent des paroles que nul n’a pu comprendre… »
Des hauteurs sacrées
Après les ravages de l’incendie de 1990, les roches dénudées en contrebas de l’Hôtié de Viviane, ont livré une belle surprise. Un dolmen est apparu, reconnaissable malgré ses supports – les orthostats – écroulés. Les pierres, protégées par l’humus et la végétation avaient encore une teinte pourpre profond.
La crête était donc un lieu consacré aux défunts. Des millénaires plus tard, on la dédia aux fées, avec une certaine continuité de pensée : on restait bien là dans le monde des esprits.
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Aujourd’hui, le tombeau de Viviane est complètement détruit, et l’on n’en voit plus de débris. C’est une simple fosse de 3 m. de longueur sur 1 m 05. de largeur et 0 m. 40 à 0 m. 50 de profondeur, circonscrite par onze pierres dont les plus élevées mesurent 1 m. 35. Lors de fouilles archéologiques réalisées en 1982 et 1983, le monument a laissé apparaître une structure très originale que l’on peut dater entre 3300 à 2800 ans avant JC.
C’est une sépulture qui a la forme d’un coffre ou d’une chambre fermée à parois de dalles de schiste. Il reposait sur un massif de pierres très bien appareillé, de forme elliptique de 12 m sur 10 mètres (voir dessin ci-dessous), un type de monument, inédit en Bretagne.
Le coffre était situé sur un petit cairn de 10 m de diamètre pour une hauteur maximale de 1 m. Les pierres qui composaient l’entourage ne devaient pas couvrir le monument mais s’arrêter à mi hauteur des dalles. Elles étaient soigneusement agencées à l’extérieur en paquets collés les uns contre les autres et inclinés à 45°. Il est possible que cette partie externe ait été construite en premier pour délimiter l’aire sacrée où devait se dérouler la cérémonie funéraire. Le soin avec lequel cet entourage de pierres a été construit laisse à penser que le tumulus était destiné à être vu ainsi avec ses pierres bien posées.
Le cairn comprenait deux parties distinctes séparées par une ligne de pierres intermédiaires médiane. Il semble que l’on ait d’abord délimité la zone du cairn, puis qu'on a sans doute bâti le coffre dans une fosse entamant légèrement le sous-sol. Cette fosse a été calée de pierres assez irrégulièrement disposées jusqu’à la moitié du cairn. A partir de cet endroit, matérialisé par une ligne intermédiaire, les pierres étaient placées de chant où obliques, formant une structure originale qui devait être spectaculaire lorsqu’elle était intacte.
Le cairn a été laissé apparent après les fouilles, puis refermé en 1984 en raison des dégradations causées par les visiteurs.
Le coffre central
Le coffre central, orienté est-ouest, mesure 2,90 m de long pour 1,10 à 1,60 m de large. Il est constitué de grande dalles de schiste rouge local dont quelques unes sont posées de biais à 45° de l’axe général. Toutes sont enfoncées dans le sous sol naturel de 0,50 m environ :
Elles avaient été bloquées par calage de pierres et un lit de terre recouvert d’un pavage de petites pierres plates. Les chercheurs de trésors avaient détruit ce dallage du centre de la tombe mais il subsistait quelques éléments dans les coins. Les dalles étaient légèrement penchées vers l’intérieur de la tombe et certaines avaient même basculé par suite des fouilles anciennes. Elles ont été redressées avec la même inclinaison que les éléments restés en place.
La couverture du coffre devait comprendre quelques dalles dont il subsiste des morceaux du côté Est du cairn. La dalle centrale Est, plus basse que les autres a pu jouer le rôle de chatière, permettant la réouverture du monument à l’aide d’une porte amovible.
PS : pour en savoir plus : https://broceliande.brecilien.org/L-Hotie-de-Viviane